Pour ma Maman

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Seize heures vingt, il reste encore deux heures. 
La machine à remonter le temps s’enclenche. Il est déjà trop tard.
Reste à se détacher paisiblement.
L’autre se souvient des « je veux partir, des trois fois zéros ou c’est immangeable …». 

Pourtant, on était plus ou moins tranquille là-bas et j’aimais quand on m’appelait Marguerite.
Depuis neuf mois, les sorties sont interdites sauf pour soigner les gros bobos.
Mais les bobos de l’âme, qui s’en soucie ?
Avant, c’était tellement mieux dans mon bel appartement là-haut. Il était grand et chaque jour je reconnaissais le fleuve, ses ponts, ses collines, ses boulevards, son voisinage…

Éternel déracinée, 
J’avais pensé me faire une place sur ma terrasse à l’abri des envahisseurs.
Mais comme   Jean Moulin et tous les miens je n’étais que de passage.

Je ne voyais plus bien
Je n’entendais plus bien
Je ne ressentais plus bien.
Il me restait les miens et leur amour incompressible.
Je me suis rapproché d’eux pour choisir encore la vie, plus au sud

J’ai vécu là-bas quatre années
En laissant aller.
Que faire en effet quand on a perdu une certaine liberté ?

De cette brisure, ne naîtra plus l’ouverture.
Et puis j’ai fait “fausse route “ comme ils disent.
La faille est entrée en moi.
Elle ne me permet plus de sortir
Pour éclairer mon dernier chemin.

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